Aisey-sur-Seine, Côte d'Or, Le Pont des Troubles |
J'étais venu voir à quoi ressemblait Le Pont Mirabeau de Guillaume Apollinaire. De
prime abord, il n’y avait rien d'extraordinaire. C’est
normal. Ce n’est pas l’œuvre du poète mais celle de Jean Resal, inspecteur
général des Ponts et Chaussées (Un juge de paix comme M. Porchauron adorerait :
des bâtisseurs d’histoires lisses, sans rendement. Paris qui charrie les
périphéries, la zone par-dessus les méandres de nos talwegs.
Paris qui tarit leurs caractères, de peur. Paris, flatteuse dresseuse anachronique ! Oh
oui ! Porchauron, le rouge au pif, jubile : des plans crus à revendre, des
pierres médusées, la nef qui touche, la nef qui coule la Seine sans issue et
avec pour solde de tout compte, Paris ne pensant qu’à Versailles). Alexandre
III, le pont, c’est Jean Resal aussi. J'étais venu voir à quoi ressemblait Le Pont Mirabeau de Guillaume Apollinaire.
A.S. Saint-Etienne - Bayern de Münich. 12/05/1976 |
L’eau
de la Seine est verte comme des prairies en Arcadie ? Mouais ! Plus
vraisemblablement, je dirais que cette mare est plutôt verte comme le maillot des anges de Saint Etienne brûlé sur l'hôtel tragique à Glasgow ce soir
en finale, où rien n'était rond, ni les ballons, les poteaux, les alcoolos, où les verts défilèrent sur les Champs, à la soupe à la grimace. En tout cas, elle est verte comme la Seine dans mon village
(département 21) où je n’ai ni stagné, ni obéi, ni désobéi. Il y a un pont
là-bas aussi, dans cet endroit magnifié, touché-coulé. On l’appelle : Le Pont
des Troubles.
Troubles
comme mes souvenirs faciles aux abords d’une route nationale entre chien et
loup, troubles comme le vert de ces femmes proues du Pont Mirabeau tombées des
nefs dans les oubliettes de cette vieille rivière, d’où l’on entend leurs voix
sous-marines qui me bouchent l’ouïe. Elles sont géantes, grandes, loin. Aller
aborder l’une d’entre elles ? Pendre ma chance ? Je décidai d’aller à sa rencontre, chatouiller en l'air la potence. Une me regarda décidément là-haut. Celle avec les lourdes mamelles côté aval. Le vertige est un vide, une question sans tête. Au dernier moment, près de la conjointure, j’ai eu peur de sauter. Nos regards s’étaient croisés. J’avais baissé les yeux. J’avais eu un peu honte. Peut-être était-ce dû à ce rêve bizarre que je fis une
nuit au bord de la vieille rivière restée loin derrière, où les songes nous
retiennent en amont. Mais les rêves, après tout, ne sont-ils pas des
bizarreries, des arrière-pensées pleines d’excuses, des singeries pesantes ?J’étais
venu voir à quoi ressemblait Le Pont Mirabeau de Guillaume Apollinaire.
Haïti, 12 janvier 2010 |
Mon
père était à genoux, les bras dans le dos, poignets croisés, force
ligotée, le cou renversé au pied d’une croix dressée dans le bois d’un arbre à
pain centenaire de son grand jardin. Il avait le torse nu, une plaie de pur sang en plein sein où la Seine coulait dans son cœur.
p'tit coup d'oeil à Montaigne! belle écriture ... comme toujours ai je envie de rajouter ! :D
RépondreSupprimerde retour !
RépondreSupprimerJamais, lorsque, lycéenne, j'aimais ce poème pour son rythme et sa nostalgie lyrique sur la fuite du temps et de l'amour, je n'imaginais que " je passerais, grâce à toi, un pont " d'une telle réalité poétique ! Ton " Pont " n'a rien à envier à celui d'Apollinaire et il fera partie du nombre...
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